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Les rapaces et leur conservation : la science, le citoyen et le chercheur.

Difficile d’imaginer un lien direct et étroit entre tous ces mots, qui mêlent des acteurs, des animaux et des disciplines. Et pourtant aujourd’hui, devant la double crise, sociétale d’un côté et d’érosion de la biodiversité de l’autre, le tout sur fond de changement climatique, les pièces du puzzle s’animent et convergent, en passant par une redistribution complète des enjeux, des objectifs et des rôles de chacun.

Dans le contexte de la biodiversité plus que dans n’importe quel autre, le citoyen devient scientifique, le chercheur redevient citoyen, et la science et l’action, qu’elle soit individuelle ou publique, se mutualisent. Quelles sont les conséquences prévisibles du changement global sur la biosphère, quels sont les processus impliqués, et quelles alternatives et solutions la société pourrait-elle engager ? Ce sont aujourd’hui les questions posées par les citoyens aux politiques, les politiques aux experts, et les experts aux chercheurs. Pour y répondre, les chercheurs ont besoin des citoyens, car la collecte des données dont ils ont besoin repose pour une large part sur la science participative : la boucle est bouclée !

La conservation des rapaces me semble exemplaire à ce titre, car cette question soulève à la fois un renouvellement des questions en écologie des populations et de véritables défis en matière de biologie de la conservation, mais repose aussi sur la conjonction entre scientifiques et bénévoles. Mon objectif n’est pas ici de dresser une liste exhaustive des recherches menées sur les rapaces mais de tenter de convaincre qu’aujourd’hui, les scientifiques et les citoyens doivent œuvrer de concert dans une opération à bénéfice réciproque. Dans le contexte de l’ornithologie en France, tout autant que dans celui de la recherche en écologie ou celui de la conservation, les rapaces constituent un cas de figure unique.

Je voudrais d’abord souligner un paradoxe qui concerne les « forces en présence ». D’un côté, de très nombreux bénévoles comprenant aussi bien des férus de rapaces que de simples protecteurs et surveillants des aires de rapaces ; de l’autre, le nombre ridiculement faible de chercheurs académiques en France qui travaillent sur les rapaces : une situation paradoxale compte tenu du véritable engouement bénévole pour les rapaces. A vrai dire, ils ne sont guère que…deux ou trois, même si certains autres chercheurs ont travaillé, ou travaillent accessoirement sur une espèce de rapace diurne. A titre de comparaison, ils sont près de 20 à travailler sur les oiseaux marins, près d’une dizaine sur les canards ou sur les limicoles. Et il y a plus de chercheurs en France travaillant sur la mésange bleue ou le manchot empereur, que sur les rapaces dans leur totalité… Est-ce un cas de figure général, partagé avec d’autres pays, notamment en Europe ? Je ne crois pas : rien qu’en Ecosse, au moins 10 chercheurs travaillent sur les rapaces, ils sont plus nombreux encore en Espagne. Même en Hollande, un pays qui pourtant ne brille pas par la richesse spécifique des rapaces nicheurs, il y a plus de chercheurs qu’en France. Je n’ai aucune explication à ce fait, mais ce fort déficit (déséquilibre, même) en ressources humaines scientifiques face à des milliers de bénévoles a plusieurs conséquences dans le cadre des relations entre la recherche et la conservation des rapaces. La première conséquence est que l’essentiel des actions qui relèvent indirectement de la science, comme par exemple le suivi des populations ou des études modestes sur de petites populations, repose presqu’exclusivement sur les bénévoles. La deuxième est que ce vaste réseau d’amateurs s’est fortement structuré, au moins aussi bien, sinon mieux, que le milieu scientifique. Particularité qui n’est pas anodine, ce réseau est national et uni : il n’y a pas, par exemple, de compétition entre structures départementales ONG (le clivage est plutôt par espèce !). Autre conséquence, la demande ou l’attente des bénévoles et des ONG vers la recherche, est forte, voire exigeante, donc extrêmement stimulante pour la poignée de chercheurs en présence. Enfin, les rapaces véhiculent auprès du public des centres d’attraction très divers, dus à leur mode de vie : puissants, prédateurs, menacés. Du coup, l’intérêt porté sur les rapaces n’est pas uniquement voué à leur protection, même si c’est une part importante.

Le contexte des rapaces et des acteurs de leur conservation est donc très particulier. J’y vois d’ailleurs l’originalité, l’audace et l’unicité de l’enquête Rapaces Nicheurs de France de 2000/2002, suivi de l’Observatoire rapaces. Cette opération a été une première au niveau national, et même dans une certaine mesure, une entreprise unique au niveau européen. Mais je ne pense pas qu’il s’agisse d’un hasard, car se sont précisément retrouvés mêlés tous ces ingrédients clés : un réseau bénévole très fortement motivé, numériquement nombreux et très bien fédéré pendant des années par le FIR puis la Mission Rapaces, et une toute petite poignée de scientifiques, qui du fait du petit nombre, a su avancer rapidement. Au final, il aura fallu seulement 20 mois entre la dernière donnée collectée et la publication des analyses complètes et finalisées dans un ouvrage en français, donc accessible à tous, d’autant qu’il a été distribué gratuitement à tous les « observateurs ».

Si les rapaces en France bénéficient d’un réseau associatif bénévole complètement original et unique, sur le plan de la recherche, le contexte est tout autant unique : les rapaces posent des défis en terme de conservation, qui sans leur être uniques sont, dans leur cas, poussés à l’extrême. Or ces défis de conservation sont également des « challenges » scientifiques. Quels sont ces enjeux et défis ? Il y a bien sûr des enjeux de connaissance, aussi bien sur le plan de l’écologie, du comportement ou de la démographie. Bien que sur ce registre les rapaces ne soient pas à plaindre (chaque espèce présente en France a déjà fait l’objet d’au moins une monographie, presque toutes en anglais ou en allemand), sur le plan de la démographie, nous ne disposons que de très peu de données sur les taux de survie et sur la dispersion. Mais globalement, l’écologie de base de toutes les espèces de rapaces en France est bien connue. Pour ce qui est de la conservation par contre, et des recherches menées dans ce cadre, le constat inverse s’impose. Le premier objectif est bien sûr le suivi des populations, qu’il s’agisse d’inventaires ou de « monitoring ». Les données d’inventaire relèvent plutôt d’une approche spatiale de la description du vivant, alors que les données à long terme se réfèrent évidemment plutôt au côté temporel. Il est bien entendu difficile de couvrir parfaitement et simultanément ces deux facettes, et c’est pourquoi on privilégie soit un inventaire instantané, généralement à grande échelle spatiale, soit un inventaire répété dans le temps. Or, grâce à la science participative, qui fait appel aux citoyens pour la collecte des données, il est possible de réaliser des inventaires à la fois précis dans l’espace et répétés dans le temps, c'est-à-dire d’obtenir une excellente résolution à la fois temporelle et spatiale. C’est ce qui a pu être réalisé dans le cadre de l’enquête rapaces, et qui se poursuit aujourd’hui avec l’Observatoire rapaces.

Les rapaces sont aussi susceptibles d’inspirer de nouvelles problématiques de recherche. Un exemple qui l’illustre parfaitement est celui de la conservation des busards cendrés. Entre le cinquième et le tiers des couples sont annuellement protégés, un effort de conservation absolument colossal et sans équivalent au monde. De l’avis de tous, et cela a été plusieurs fois étayé par des simulations mathématiques, les populations s’effondreraient en l’absence de protection, et cet effort humain n’est pas tenable a long terme, du fait d’un certain essoufflement des bénévoles ou des coordinateurs. Quelle stratégie de conservation alternative envisager ? Aucune n’a véritablement encore été suggérée, et on est donc encore loin de la tester en grandeur réelle. Cette question, à l’origine purement une question de conservation, est en réalité une question fondamentale d’écologie de la conservation ; c’est celle des grandes et vastes populations que l’on ne peut protéger avec de modestes réserves naturelles, a fortiori en plaine céréalière. C’est la question des populations naturelles qui ont une distribution continue dans l’espace, et pour lesquelles les modèles mathématiques décrivant la dynamique des populations dans l’espace sont inadéquats. En clair, c’est un verrou de recherche, pour lequel la dispersion des individus, c'est-à-dire ce qui connecte ces populations, est un paramètre clé. Voici donc comment une question de conservation révèle un verrou scientifique fondamental, qui est en passe d’être levé grâce à la science participative et l’action de près de 1000 bénévoles ou observateurs (pour …un chercheur) dans le cadre du programme national de marquage des poussins de busard cendré.

La science, notamment l’écologie, repose sur l’observation de la nature. Longtemps considérée comme une science contemplative, l’écologie est structurée autour de théories fondatrices, prédictives et puissantes, parmi lesquelles la théorie de l’évolution darwinienne tient une place centrale. L’écologie, comme l’évolution, demeurent ancrées sur les données empiriques, et parmi elles les données d’inventaire ou à long terme ont occupé, et occupent toujours une place capitale. Les séries à long terme ou les inventaires réalisés sur de grands espaces prennent aujourd’hui une valeur supplémentaire dans le cadre du changement global, car au côté des modèles, ils permettent de prédire, dans une certaine mesure, le futur à partir du passé. Les citoyens sont amenés à œuvrer aux côtés des scientifiques, et chacun doit accepter les règles de cette nouvelle donne. C’est au final un partenariat renouvelé entre scientifiques et citoyens : les chercheurs, pour beaucoup, ont fait le pari de cette nouvelle équation, ce qui n’est pas forcément facile, mais ils font des efforts pour communiquer au grand public, qui devient leurs collaborateurs, la démarche et les résultats. Espérons que les bénévoles, si nombreux et motivés, relèveront avec les scientifiques les défis qui s’annoncent.

Par Vincent Bretagnolle (Centre d’Etudes Biologiques de Chizé, CNRS).

Source : Rapaces de France - L'OISEAU magazine - hors-série n°12 - 2010.

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